Jean-Louis Fortun
AUTEUR PHOTOGRAPHE
C’est une question à la fois éthique et philosophique ; voilà quelques éléments de réflexion :
On peut poser la question en d’autres termes : où commence la retouche ? Après tout, nos appareils photos sont tous munis de modes (portrait, paysage, action etc.) qui modifient les paramètres logiciels, on est amené parfois à retirer un grain de beauté disgracieux, accentuer le bleu de la mer, assombrir un ciel orageux…
C’est déjà de la retouche et ça ne me pose aucun problème ! Après tout, avant une séance photo, le modèle est maquillé pour optimiser l’effet recherché ? Vous voyez une différence ? Moi non !
La retouche peut aller beaucoup plus loin (montages etc..) et si ce n’est pas ma « tasse de thé », je ne condamne pas, c’est uniquement par choix artistique.
Il y a, malgré tout, un domaine où la retouche ne devrait pas exister et c’est le reportage, dont le but est de traduire un instantané dans la réalité, sans artifice ; il en va de la crédibilité du photographe reporter.
« Le poids de mots, le choc des photos » telle est la devise de Paris Match ; eh bien, on peut tenter un rapprochement avec l’écriture : un roman n’est-il pas une histoire réelle retouchée ? Bien sûr, mais on l’accepte sans même se poser de questions et surtout, sans qu’aucun message d’avertissement ne vienne polluer notre voyage ; tandis qu’une photo, on a tendance à croire, inconsciemment, que c’est la réalité !
C’est culturel…
Ouvrons notre esprit à une approche artistique de la photographie (je pense notament aux magazines de mode) et acceptons d'y voir une interprétation libre et à l'esthétique "artificielle", comme on le fait en portant notre regard sur un Matisse, Picasso, Warhol. Laissons la réalité aux photographes reporters et exigeons de leur part une intégrité journalistique !
Vous n’êtes pas d’accord ? Dites-le moi, je reste ouvert à la discussion !!!
